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Loi pour l’égalité des droits et des chances, participation et citoyenneté des personnes handicapées

Article publié le mardi 1er mars 2005.


Cette première analyse du texte final porte sur les articles qui nous paraissent avoir le plus de répercussions sur la prise en charge et la vie quotidienne des enfants et adultes sourds et malentendants.

Cette loi devrait être appliquée à compter du 1er janvier 2006, après la publication des 80 décrets attendus.

Nous ne sommes pas du tout convaincu que cette loi représente un réel progrès par rapport à la loi qu’elle remplace (loi de 1975).

De belles intentions sont affichées :
-  principe de l’intégration de tous au sein de la cité,
-  sortir le handicap du domaine de l’aide sociale et de la charité pour le faire entrer dans la protection sociale.

Mais pour cela, il faudra des moyens financiers importants. Les premières informations dont nous disposons sur ce qui restera du produit de la cotisation versée par les employeurs à la CNVA (contribution des salariés par le moyen d’un jour férié travaillé) ne nous rassurent pas. L’Etat a déjà annoncé les « ponctions » qu’il compte effectuer sur ce produit, et la part restante pour le financement de la « compensation individuelle » risque d’être largement insuffisante. D’autant plus que l’AGEFIPH a annoncé immédiatement son désengagement financier sur plusieurs mesures ( prothèses auditives, accompagnement des étudiants handicapés ), renvoyant vers l’Etat ( et donc la CNVA ), la prise en charge de ces coûts.

Nous approuvons par contre, les progrès réalisés dans le domaine de l’accessibilité ( télévision, services publics) et nous nous réjouissons de la reconnaissance de la Langue des Signes Française.

COMPENSATION / RESSOURCES

1) Compensation

Il est créé un droit à compensation des conséquences du handicap quels que soient l’origine et la nature de la déficience , l’age ou le mode de vie . Les besoins de compensation sont inscrits dans un plan de compensation élaboré en considération des besoins et des aspirations de la personne handicapée

2) Prestation de compensation

Les bénéficiaires de la prestation ne sont pas toutes les personnes handicapées mais celles :
-  ayant dépassé l’âge de l’ouverture des droit à l’allocation d’éducation spéciale (les enfants en sont pour le moment exclus)
-  dont l’age est inférieur à une limite fixée par décret

QUESTION : cas des personnes âgées , quelle sera la limite ? 60 ans ? Les conditions d’âge devraient être supprimées dans un délai de 3 ans pour les enfants et de 5 ans pour les adultes

-  dont le handicap répond à des critères définis par décret L’évaluation de la nouvelle prestation ne sera plus comme auparavant réalisée sur la base d’un taux d’invalidité.

QUESTIONS : quels seront ces critères ? comment sera pris en compte le domaine de la surdité ? Cette prestation pourra t-elle permettre de financer des aides techniques comme les prothèses ,des aides humaines ? interprètes , codeurs ,interfaces ? Des incertitudes demeurent sur la complémentarité entre la future prestation compensatrice et les allocations existantes dans le domaine du handicap mais aussi avec des prestations dispensées par l’assurance maladie A l’avenir qui paiera quoi ? Comment seront réparties les dépenses liées au handicap entre les différents financeurs : assurance maladie, mutuelle, CNSA, fonds AGEFIPH, fonds FEHAP, futur fonds fonction publique, prestations diverses des Conseils Généraux, et d’autres encore. Alors que nous n’avons aucune réponse à ces questions, la décision récente de l’AGEFIPH de ne plus financer les mesures en faveur des étudiants handicapés dès septembre 2005 semble prématurée.

3) CNSA CAISSE NATIONALE DE SOLIDARITE POUR L’AUTONOMIE ; Quelle part pour la compensation individuelle ?

Il est créé une Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie qui a pour but de financer la perte d’autonomie des personnes âgées et handicapées à domicile ou en établissement, de contribuer au financement de la compensation.

La CNSA devra aussi assurer un rôle d’expertise technique et de propositions pour les référentiels nationaux d’évaluation des déficiences et pour les méthodes et outils utilisés pour apprécier les besoins individuels de compensation

Les recettes de cette nouvelle Caisse proviendront de la journée fériée travaillée ( et d’une dotation de l’Etat ?)

Notre commentaire : rappelons qu’à l’origine les recettes de cette CNSA devaient aller uniquement vers le Handicap. Suite à la canicule, les recettes seront partagées avec les Personnes Agées. Première interrogation : les produits seront ils suffisants ? Nous avons des doutes.

Reste également posée la question de la répartition des sommes entre les compensations collectives et les compensations individuelles. Nous savons par ailleurs que l’Etat a l’intention de « ponctionner » la CNSA pour financer des établissements et services. La CNSA devra également participer au financement des Maisons du Handicap.

QUESTION : que restera t-il pour la prestation de la compensation individuelle ?

4) Ressources des personnes handicapées

Cet article concerne les conditions d’attribution de la garantie de ressources. Cette garantie de ressources, fixée à 80 % du Smic ( soit 728 euros) cumulera l’allocation adulte handicapé (AAH) et un complément de ressources.

La revendication des associations pour un véritable « revenu d’existence pour une vie autonome » pour les personnes qui ne peuvent pas travailler est rejetée. Les critères d’attribution restent particulièrement flous. La rédaction des futurs décrets sera déterminante.

Une majoration de la pension de retraite des travailleurs handicapés partant avant 60 ans ( 120 trimestres acquis ) est adoptée ; mais qui financera cette mesure : le régime de retraite des salariés ?, la solidarité nationale ( fonds de solidarité vieillesse déjà en déficit ) ?, par une augmentation de la CSG ?

SCOLARITE

1) Scolarité

Le principe d’inscription à l’école ordinaire est bien affiché ,tout enfant est inscrit dans l’école ou l’établissement le plus proche de son domicile qui constitue son établissement de référence.

Cependant des restrictions existent : dans le cadre de son projet personnalisé, l’enfant pourra être inscrit par son établissement de référence , en lien avec l’équipe de suivi et avec l’accord de ses parents dans une école ou un établissement autre que celui de référence si ses besoins nécessitent qu’il reçoive sa formation dans le cadre de dispositifs adaptés [( exemple une UPI i dans un collège autre que celui de référence)

Exceptionnellement, ou de façon transitoire, lorsque ses besoins particuliers le justifient, cette formation lui est dispensée par l’éducation nationale dans les établissements de santé ou services de santé médico sociaux

Notre Commentaire : en clair pour les déficients auditifs ils pourront toujours être scolarisés dans les établissements médico- sociaux. Mais une nouveauté : la formation sera dispensée par l’éducation nationale. Il y a donc nécessité de repenser la situation des personnels enseignants pour déficients sensoriels relevant du ministère de la santé. Une étude d’impact est prévue à ce sujet par le Sénat.

Le projet personnalisé et l’équipe de suivi

Chaque enfant ou adolescent a droit à une évaluation de ses compétences au moins une fois par an, les parents sont entendus obligatoirement à cette occasion.

En fonction des résultats de cette évaluation ,il est proposé un parcours de formation qui fait l’objet d’un projet individualisé de scolarisation . Ce projet constitue un élément du plan de compensation

Des équipes de suivi de la scolarisation sont crées dans chaque département. Elles assurent le suivi des décisions de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées. Elles comprennent l’ensemble des personnes qui concourent à la mise en œuvre du projet individualisé de scolarisation et en particulier les enseignants qui ont en charge l’enfant ou l’adolescent

Nos Commentaires : L’accès effectif des enfants à l’école ordinaire dépendra en grande partie des dispositions prises dans la loi sur l’école, l’inscription à l’école ordinaire risque d’être de pure forme

Le parcours de formation est proposé aux parents par les équipes de suivi , les parents sont uniquement entendus , ils ne sont pas au cœur du processus de décision, ce fonctionnement semble en recul par rapport au fonctionnement actuel

2) Mesures particulières aux enfants sourds

Dans l’éducation et le parcours scolaire des jeunes sourds la liberté de choix entre une communication bilingue ,langue des signes et français et une communication orale est de droit.

La reconnaissance de la LSF comme une langue à part entière est insérée dans le code de l’éducation , son enseignement est confié à l’éducation nationale , le Conseil Supérieur de l’Education veille à favoriser son enseignement.

Notre analyse : Il y a bien reconnaissance de la langue des signes mais les conditions d’exercice du choix de la langue des signes et les conditions de son enseignement seront définis par décret Beaucoup de questions restent en suspens et notamment la formation des enseignants en langue des signes . Faut-il créer des « filières » langue des signes ou permettre une intégration en classe ordinaire avec des aides humains en langue des signes ? le débat sur ce point ou d’autres reste ouvert

3) Enseignement supérieur

Des assistants d’éducation peuvent être recrutés par l’Etat pour exercer les fonctions d’aide et d’accueil à l’intégration des élèves handicapés.

Notre commentaire : ce dispositif n’est déjà pas adapté aux sourds au niveau collèges et lycées car la formation des auxiliaires est insuffisante , comment pourra-t-il fonctionner dans l’enseignement supérieur ?

MAISONS DEPARTEMENTALES

Une maison des personnes handicapées est crée dans chaque département. Elle exerce une mission d’accueil d’information, d’accompagnement et de conseil aux personnes handicapées.

Elle met en place et organise :

-  le fonctionnement de l’équipe pluridisciplinaire chargée d’évaluer les besoins de compensation et de proposer un plan de compensation du handicap
-  le fonctionnement de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées.

Elle est administrée par une commission exécutive présidée par le président du conseil général.
Elle gère un fonds départemental de compensation du handicap.

La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées comprend des représentants du département des services de l’état des organismes de prestations sociales ,des organisations syndicales ,des organismes gestionnaires d’établissements ou de services des associations de parents d’élèves et pour au moins un quart de ses membres des représentants de personnes handicapées et un membre du conseil départemental consultatif des personnes handicapées.

La commission peut être organisée en sections locales ou spécialisées La commission est compétente pour
-  se prononcer sur l’orientation de la personne handicapée et les mesures propres à assurer son insertion scolaire ou professionnelle et sociale
-  désigner les établissements ou services correspondant aux besoins de l’enfant ou de l’adolescent
-  apprécier si l’état ou le taux d’incapacité de la personne handicapée justifie l’attribution de l’AES et de ses compléments pour les enfants de l’AAH pour les adultes, de l’attribution d’une carte d’invalidité.
-  si les besoins de compensation justifient l’attribution de la prestation de compensation

Nos commentaires : La maison du handicap est présidée par le président du conseil général, le département aura donc une responsabilité importante dans la politique en direction des personnes handicapées.

La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées remplace les actuelles CDES et COTOREP. Sa composition est sensiblement différente avec une place plus grande aux représentants des personnes handicapées.

QUESTIONS : de quels moyens disposeront réellement ces maisons ? Il suffit de voir la situation actuelle des CDES et COTOREP, qui manquent cruellement de crédits malgré toutes les promesses faites ces dernières années.
Dans le domaine de l’Emploi et de la Formation professionnelle : des clarifications s’imposent concernant l’articulation et la complémentarité des missions de ces Maisons avec les autres dispositifs ordinaires ou spécialisés : sites à la vie autonome, CAP EMPLOI, ANPE, Missions Locales, Centres de bilans.

Des effets pervers sont à craindre : Ces Maisons ne vont elles pas « capter » le public handicapé et gêner son intégration dans les dispositifs ordinaires ?

FORMATION PROFESSIONNELLE

1) Création d’un fond Fonction Publique

La Fonction publique doit maintenant appliquer l’obligation d’emploi de 6%.
Il est créé un fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Commentaires : La Loi prévoit une montée en charge progressive de ce fonds, étalée jusqu’en 2010. Cette durée est trop longue. La fonction publique qui devrait être exemplaire dans le domaine de l’emploi des personnes handicapées restera donc très en retard par rapport au secteur privé.

2) Principe de non discrimination et obligation d’emploi

La loi garantit le respect du principe d’égalité de traitement dans les entreprises pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification.
L’accès à la formation et à la qualification doit être favorisée en proposant une gamme complète de services aussi bien dans les organismes de formation ordinaires et les organismes spécialisés.

Commentaires : la rédaction du texte laisse place à de nombreuses interprétations. Le texte parle d’ « obligation d’emploi » et d’autre part a recourt à une notion aussi impossible à cerner que celle de « mesures appropriées aux charges non disproportionnées supportées par les employeurs » laissant large ouverte une brèche à des dérogations multiples.
Le texte parle de sanctions et de contraintes, mais en multipliant les possibilités dérogatoires. Dans ce domaine il faudra être particulièrement vigilant lors de la rédaction des décrets d’application.

3) Refus d’intégrer dans la loi un statut législatif pour les organismes d’insertion professionnelle

Nous trouvons parmi ces organismes , les services gérés par nos associations régionales « Dispositifs Emploi Formation » pour les personnes sourdes et malentendantes). La déclaration de Mme la Secrétaire d’Etat aux Personnes Handicapées pendant les débats au Parlement est particulièrement inquiétante concernant la pérennisation de ces services.
Nous la citons : « Les organismes d’insertion professionnelle jouent un rôle important. Toutefois, il ne faut pas donner un statut législatif à ces organismes, qui répondent partiellement, et pour des durées variables, aux demandes d’un public spécifique, et n’ont pas vocation à se constituer en réseau national ni à être systématiquement conventionnés et financés par l’AGEFIPH . Certains de ces organismes pourront bien sûr bénéficier d’une aide de l’AGEFIPH. »

4) Nouveau mode de calcul pour les décomptes des salariés en entreprises

Un nouveau mode de calcul du nombres de salariés handicapés dans les entreprises est retenu. : au système de proratisation en fonction du degré de handicap ( un bénéficiaire lourdement handicapé comptait pour plusieurs unités) est substitué une forfaitisation ( un bénéficiaire = 1 unité ) .

Commentaire ce nouveau mode de calcul risque de pénaliser les candidats à l’emploi les plus lourdement handicapés

Accessibilité

1) programmes télévision

Accessibilité pour les personnes sourdes et malentendantes des programmes de télévision. Dans un délai de 5 ans tous les programmes des services de télévision dont la part d’audience dépasse 2,5 % devront être accessibles ( obligation de sous-titrage, recours à la Langue des Signes). Cependant des dérogations peuvent être justifiées par les caractéristiques de certains programmes

Commentaire : il s’agit là d’un progrès indéniable mais la formule « caractéristiques de certains programmes » peut prêter à de nombreuses interprétations

2) recours à des aides humaines

Dans leurs relations avec les services publics et organismes chargés d’une mission de service public, les personnes déficientes auditives bénéficient , à leur demande, d’une traduction écrite simultanée ou visuelle de toute information orale ou sonore les concernant...Le dispositif de communication adapté peut notamment prévoir la transcription écrite ou l’intervention d’un interprète en langue des signes française ou d’un codeur en langage parlé complété.

Devant les juridictions administratives civiles et pénales toute personne sourde bénéficie du dispositif de communication de son choix.

Des dispositions concernent également le permis de conduire

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