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Journées d’études Deaf Studies, Deaf History : quelles épistémologies ?

Compte-rendu Journées d’études “Deaf Studies/Deaf History”, EHESS, 26-27 novembre 2012
Article publié le samedi 2 février 2013.


Compte-rendu Journées d’études “Deaf Studies/Deaf History”, EHESS, 26-27 novembre 2012. Un domaine de recherches en sciences humaines et sociales s’est développé depuis la fin des années 1960 aux Etats-Unis : les Deaf Studies, en français provisoirement « Études Sourdes ».

Ces deux journées d’études avaient pour thème Deaf Studies et Deaf History : quelles épistémologies ?

Ce domaine de recherche s’est progressivement implanté dans le monde anglo-saxon, sur la vague des Cultural Studies et des recherches se concentrant sur des populations spécifiques ayant l’expérience de l’exclusion, du stigmate, des spécificités culturelles et constituant, au sein des universités, des départements de recherches et d’enseignement propres . Il s’est également implanté en Europe, plus particulièrement en Allemagne avec la fondation de l’institut de recherche, Institut für Deutsche Gebärdensprache und Kommunikation Gehörloser à l’université d’Hambourg et le centre Deaf Studies à l’Université de Bristol.

La question a été de savoir si ce domaine de recherches peut être transposé en France ? La première difficulté est l’organisation spécifique du monde universitaire français qui est relativement inadéquate pour la mise en place d’un département d’études spécifiques. (Néanmoins cela n’est pas impossible). La deuxième difficulté est que pour être efficaces, les Études Sourdes nécessitent une recherche transdisciplinaire, regroupant des chercheurs d’horizons différents, du linguiste jusqu’au sociologue, avec pour point commun la langue des signes et le sourd.

Les différentes interventions au cours des deux journées ont permis de faire comprendre un point essentiel des Études Sourdes : penser à l’aspect humain de la vie du sourd, et à la place primordiale de la langue des signes dans la vie des sourds. Cette langue se retrouve au centre des préoccupations des chercheurs, par son impact dû à son côté exceptionnel, et par sa spécificité linguistique.

Le premier jour, après un exposé sur l’histoire des Deaf Studies, et des courants qui la constituent, les présentations se sont concentrées sur le côté sociologique, anthropologique et culturel de la vie du sourd, de l’influence de la langue des signes, et de la place du sourd dans la société française.

Le deuxième jour, la question se concentre plus sur l’histoire de la communauté sourde, de sa place dans la société française, citant au passage (cela a été l’objet d’un intervention) quelques éminents personnages de l’histoire française qui ont eu des liens étroits avec les sourds. Puis, il a été question d’une analyse critique et historique des discours médicaux autour de la surdité, discours qui souvent ne reconnaissent pas l’existence d’une communauté sourde, communauté qui de ce fait balance entre reconnaissance et rejet.

Remarquons que nous nous sommes essentiellement focalisés sur Deaf Studies et moins sur Deaf History ce que l’on peut comprendre car la grande préoccupation des sourds actuellement en France est d’avoir sa place dans la société tant que personne sourde à part entière. Les aspects historiques de la vie des sourds sembleraient moins urgents à traiter. Il faut aussi remarquer le retard du développement des recherches dans ce domaine, la France étant marquée par le développement des sujets qui ont avoir à la vie quotidienne des sourds : l’éducation, la langue, l’accès aux services. Cependant c’est un point d’un grand intérêt et qu’il nous faudra voir dans une prochaine conférence.

Ces deux jours ont permis de montrer qu’il existe tout un travail de réflexion venant de différents secteurs de la recherche en Sciences Sociales et Humaines sur la place du sourd dans la société française. Ces recherches ont émergés à la fin des années soixante dix en France sur les pas des précurseurs tels que Bernard Mottez et Harry Markowicz et se sont développés dès le fin des années quatre vingts avec Christian Cuxac, Yves Bernard, Alexis Karacostas, Benoît Virole, Jean-René Presneau, Yves Delaporte entre autres. L’influence des travaux des philosophes comme Foucault et Canguilhem a eu en retour une répercussion sur le développement des recherches autour des sourds.

Les Études Sourdes devraient trouver une place dans le paysage universitaire français à partir d’une réflexion comparative et critique des paradigmes en question. Ces recherches sur les sourds peuvent permettre d’apporter un nouveau point de vue, et comme l’a dit un auditeur : « Pourquoi ne pas faire des études sur le regard du sourd sur le monde entendant ? Avoir une vision extérieure sur nos habitudes, Cela en intéresserait plus d’un ! ».

Ainsi, les Etudes Sourdes peuvent apporter un complément à la diversité qui constitue l’Humanité.

auteur : Yann Cantin

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