Par Oumar Tély Diallo (Author)
IFES (International Foundation for Electoral Systems) Guinée, a organisé une conférence de presse le 8 mars à la maison de la presse, pour la remise officielle d’un manuel intitulé ‘’Lexique de quelques termes électoraux en langue de signes usuels des personnes sourdes de Guinée’’. Le manuel a été remis au directeur national de la protection sociale. Les sourds muets ont le droit de voter, tout comme les personnes bien portantes. C’est dans cette logique que Karou Kaba, conseiller pédagogique à l’école des sourds muets de Boulbinet, avec IFES, sur financement de l’Union Européenne et le Programme de Consolidation de la paix des Nations Unies (PBF), a mis en place ce manuel de 50 pages, composé de cinq chapitres. Un des chapitres explique en langue de signe la procédure de vote, fondement du manuel... Et d’autres chapitres complémentaires sur la nation, le handicap et l’autorité de l’Etat.
Mais, pour une participation effective des personnes handicapées au processus électoral, il y a un vrai handicap. Mais, Karou Kaba se bat avec les moyens de bord. « C’est en attendant de mettre en place un dictionnaire en langue de signes, que nous avons mis en place le manuel pour faire participer les sourds muets, à l’exercice de leurs droits civiques ». Mais faudrait-il qu’ils en soient sensibilisés, déclare-t-il. A cela s’ajoute d’autres problèmes liés à la formation des sourds muets. Karou Kaba se dit choqué : « L’école a été créée en 1964 et jusqu’à présent il n’y a pas de collège, ni de lycée. Je suis fortement touché. En 1985, j’ai commencé à servir dans cette école. Puis, je suis allé poursuivre les études. A mon retour j’ai voulu écrire le dictionnaire pour aider l’école et les élèves à mieux communiquer. Mais, il fallait trouver un appareil photo, prendre les signes en photo puis les traduire. En ce moment, la guinée n’était pas à l’ère appareils photos numériques. Faute de moyens, l’aventure a tourné court. Plus tard, M. Kaba a encore essayé, ça n’a pas marché. Il faut beaucoup de moyen pour le réussir. Alors, il demande aux bonnes volontés d’aider l’école pour réussir ce projet ».
L’autre problème des sourds muets est qu’ils ignorent leurs droits. Boubacar Barry, le directeur de l’école se souvient. « A Kankan pour la première fois quand nous sommes arrivés pour sensibiliser les sourds ; quand on leur a fait comprendre qu’ils ont les mêmes droits que les autres personnes, ils ont tous pleuré. Et même à Conakry, les sourds muets ne connaissent pas leurs droits ».
C’est un moment d’émotion, dit Jacques Bonimy, le responsable du département formation de la Ceni qui a promis sur le champ, d’inclure dans la formation, la langue des signes. « C’est vrai, nous avons toujours eu la volonté d’organiser des élections inclusives. Et quand on dit élection inclusive, on pense aux partis politiques. Alors qu’il s’agit d’inclure toutes les personnes qui n’ont pas la capacité de se rendre aux bureaux de vote. Nous avons réfléchi, comment le faire et c’est ainsi que IFES nous aide pour que les personnes handicapées puissent voter, avec assistance. Donc, c’est une fierté pour nous de voir des personnes handicapées engagées pour ce projet ».
La Guinée qui a ratifié la convention internationale sur les droits des personnes handicapées, se trouve dans l’obligation de les prendre en compte dans la vie de la nation. Selon le dernier recensement de 1996, la Guinée comptait plus de 21 mille enfants sourds, sourds muets et malentendant d’âge scolaire.