La loi de février 2005 a reconnu la Langue des Signes Française ou LSF comme langue à part entière.
Une circulaire parue au BO de l’Education Nationale du 4 septembre 2008 définit les conditions de mise en œuvre de son enseignement. Mais cette circulaire entretient un flou permanent entre enseignement de la LSF, communication bilingue et enseignement en LSF.
Ainsi, le titre trois de la circulaire qui définit le public auquel l’enseignement de la LSF s’adresse, fait référence non plus à l’enseignement de la LSF mais à l’éducation bilingue laquelle est ensuite confondue à une éducation en langue des signes dans des classes bilingues où « Le « dire, lire, écrire », s’agissant de l’enseignement aux élèves sourds, devient « dire en L.S.F. » (en face à face ou en différé) et « lire et écrire en français » [1] .
Cette communication bilingue (ou l’enseignement de la LSF ?) serait réservée aux seuls jeunes sourds dont les parents ont fait un choix bilingue et éventuellement à leur fratrie.
Qui sont les jeunes sourds dont les parents ont fait un choix bilingue comme défini dans cette circulaire (c’est à dire avec pour objectif premier l’acquisition de la langue française écrite) ?
95% des enfants sourds naissent de parents entendant
l’implantation cochléaire est proposée de plus en plus tôt
La majorité des parents est donc dans un projet d’acquisition de la langue française orale (ce qui n’exclut pas l’acquisition de la LSF).
Les enfants concernés seraient donc majoritairement les enfants sourds de parents sourds : or ils représentent 5% des 12000 enfants sourds scolarisés soit une dizaine d’enfants par département (tous âges confondus).
La loi de février 2005 a reconnu la Langue des Signes Française comme deuxième langue de la République. Cette langue doit donc être enseignée et trouver sa place au sein de l’école.
Pourquoi réserver son enseignement aux seuls jeunes sourds ? Cette interprétation du texte de loi est extrêmement restrictive et parait en contradiction avec la possibilité offerte à tout élève (entendant ou non) de présenter une option LSF au BAC.
Enfin, qui seront les enseignants susceptibles d’enseigner la LSF ou en LSF ?
Un CAPES LSF vient d’être créé ce qui est positif mais quelle sera la place laissée aux personnes sourdes dans ce dispositif ?
De nombreux enseignants sourds sont contractuels ou prestataires salariés d’une association, ici ou là dans les académies avec un statut précaire. Ils ne répondent pas aux conditions exigées (statut et niveau de diplômes) pour postuler au capes interne. Or ce sont eux qui détiennent les compétences linguistiques en LSF.
Concernant le CAPES externe, la crainte est très forte que s’y inscrivent massivement des professeurs déjà titulaires en maths, histoire...et qui ont des compétences en LSF. Le problème posé est la validation de ces compétences LSF par la création d’une certification complémentaire en LSF.
Là encore les personnes sourdes risquent fort d’être exclues.
En conclusion nous demandons que la LSF soit :
enseignée aux enfants sourds dont les parents ont fait le choix d’une éducation bilingue, cette éducation bilingue pouvant prendre plusieurs formes : une éducation en langue des signes dans des classes bilingues, une scolarisation en milieu ordinaire avec mise en place d’interprétation et de soutiens pédagogiques,
enseignée aux enfants sourds et entendants qui le souhaitent avec possibilité d’option LSF au BAC mais également la possibilité d’opter pour la LSF comme deuxième langue vivante.
Cet élargissement du périmètre d’enseignement nécessiterait d’ouvrir un plus grand nombre de postes au CAPES (au moins 20).
Concernant les personnes sourdes elles-mêmes, elles ont droit à une reconnaissance de leurs compétences, reconnaissance qui va leur échapper totalement avec le système mis en place.
Nous demandons donc :
qu’un recensement exhaustif des personnes sourdes enseignant la LSF soit réalisé en comptabilisant les personnes travaillant dans l’éducation nationale mais aussi celles enseignant dans des associations.
qu’un plan de formation soit mis en place pour que ces personnes puissent acquérir une certification par la VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) et ainsi prétendre à un statut stable dans le cadre de l’éducation nationale.
Ce communiqué est extrait d’une lettre envoyée au Ministre de l’Education Nationale que vous pouvez télécharger.
[1] Arrêté du 15-7-2008, JO du 13-8-2008, in ‘enseignement à l’école élémentaire, préambule, paragraphe 5