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Les sourds, une minorité invisible

Un livre de Fabrice Bertin
Article publié le mercredi 24 février 2010.


De la surdité, notre société ne retient souvent que la déficience sensorielle, le handicap. Dans cet ouvrage, Fabrice Bertin décrypte la construction historique et anthropologique d’une véritable culture des sourds.

De tout temps et en tout lieu, la surdité interpelle. Pendant longtemps, nul n’a été capable de statuer sur sa nature. Les sourds sont-il des infirmes, des étrangers, des sots ? À la différence des autres infirmes, ils sont autonomes. Ils travaillent et développent une communication inédite (« brouillonne » à ses débuts), que l’on peut qualifier de visio-gestuelle.

(JPG) De la première génération d’élèves sourds instruits par l’Abbé de l’Épée (soit une centaine entre 1760 et 1780), aucun ne nous est connu comme un acteur d’une histoire des sourds ; l’objectif premier étant surtout d’en faire de bons ouvriers (et de bons chrétiens). Dans cette première école pour sourds se développe une langue des signes déjà existante.

Tandis qu’elle se formalise et s’épanouit, le XIXe siècle tranche la question de la surdité et choisit la voie de la médicalisation. On s’acharne alors à tenter de réparer un organe défaillant au détriment du mode d’expression naturel et séculaire des personnes sourdes. La langue des signes est diabolisée, interdite de fait, stigmatisée par les tenants de la tradition oraliste pour qui la parole est incontournable... Il n’est pire sourd que celui qui ne veut entendre, dit-on. Ce dicton populaire rappelle d’ailleurs que compréhension et audition sont très tôt amalgamées, et avec lui l’idée que la parole est nécessaire à l’intégration des sourds dans la société. Leur éducation et leur considération ont donc gravité autour de la production orale, sous-tendant plusieurs questions de fond : la parole est-elle un support de la pensée ? Les sourds doivent-ils apprendre à parler pour parvenir à penser ? Une langue peut-elle être émise autrement que par la voix ? Face à cela, les sourds résistent. Une véritable culture émerge autour de la langue des signes qui se perpétue de manière officieuse. Ils vont jusqu’à revendiquer un peuple sourd, une nation sourde. Un processus au long cours vers la reconnaissance est en marche.

Cet ouvrage engage à considérer la surdité dans une autre perspective que celle du handicap ; une réflexion essentielle à l’heure où la réhabilitation de la LSF devient réalité, y compris dans le domaine scolaire.


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